Transcription textuelle Protéger

Le barrage est plus haut. Les deux conduits — les deux tuyaux — s'en venaient ici. Et la bâtisse — la centrale — était construite dans ce trou-là.

Alors ici, dans le fond, tout ça, ils allaient dynamiter ça pour faire passer les tuyaux dans la centrale et l’eau serait retournée dans la rivière par ici.

Alors moi, en m’installant là, juste à côté, ils ne pouvaient pas vraiment dynamiter. Je me mettais dans les pattes du contracteur.

C’est ici qu’en 2002, on a fait une occupation d’une quarantaine de jours, du 18 octobre 2002 au 26 novembre.

On a établi un campement ici, avec un tipi qui était juste à côté, ici, avec une tyrolienne, une tente suspendue — un porter hedge, qu’on appelle en termes d’escalade.

On avait fait une conférence de presse pour lancer l’opération « Suspend », pour suspendre les travaux de la minicentrale qui étaient déjà amorcés.

Puis en même temps, en se suspendant au-dessus du vide, c’était de frapper l’imaginaire puis d’attirer l’attention médiatique sur un projet. Ce n’était pas une centrale nucléaire qu’ils voulaient construire, donc les promoteurs appelaient ça la « centrale au fil de l’eau ».

Ça a quasiment l’air poétique, bucolique, mais pour nous c’était un sacrilège de construire un barrage pour si peu d’énergie qu’on n’avait pas besoin en période de surplus énergétique, puis pour enrichir les poches d’un propriétaire privé.

Donc, c’était une bataille environnementale, oui, mais plus que ça, il y avait un aspect économique, il y avait un aspect de protection du territoire, protection de la rivière, contre la privatisation des ressources aussi.

Mais quand même, je pense qu’on a mis ben gros du sable dans l’engrenage de ces projets-là, puis aujourd’hui il y a des rivières qui coulent encore naturellement sans avoir été harnachées par les promoteurs privés.

Sébastien Rioux, Seb pour les intimes.

Quoi dire ? Je suis artiste créateur, que ce soit musicien, vidéo, photographe.

Je suis Pistolois né ici et qui a voyagé un peu et qui est revenu.

Tu sais, avant de me battre pour la rivière Trois-Pistoles, je n’étais pas nécessairement, puis à la limite je ne me considère pas encore comme un environnementaliste.

Je me considère juste comme un citoyen qui prend soin de son milieu.

Si vous voulez l’appeler un environnementaliste, fine, mais au départ, quand on voulait protéger la rivière Trois-Pistoles, on ne se disait pas : « On est des environnementalistes, on va aller sauver la forêt, on va aller sauver la planète. »

On a dit : « Hey ! Il faut sauver notre rivière ! » Et en plus, on a gagné !

Merci la vie, mais j’ai commencé mon militantisme avec une grosse victoire, tu sais, puis toute ma vie je me suis dit qu’il n’y a rien d’impossible, qu’on peut faire reculer un gouvernement.

Et de là est parti notre vouloir d’en même temps se dire : « Crime, qu’est-ce qu’on fait avec notre région ? » Parce que oui, on a été vus pendant un grand bout comme les « empêcheurs de développement » et tout ça, mais nous ce qu’on essayait de dire, c’est qu’on veut un autre développement. On aime tellement notre région qu’on veut un autre développement plus intelligent.

Arrêtons de faire comme tout le monde fait et que ça chie, dans le fond. Donc c’est là que dans le tipi on a commencé à réfléchir à des alternatives.

Par le biais d’activités, d'ateliers, de conférences puis de spectacles, Écho-Fête mobilise à Trois-Pistoles des regroupements écologiques afin de dynamiser le milieu local et d’orienter son avenir selon des axes de développement durable. En créant un rassemblement écologique, éducatif, touristique et culturel, l’organisation contribue grandement à redynamiser la région, tout en lançant un message de sensibilisation dont l’écho se fait entendre partout au Québec.

On a mis en place un festival environnemental, Écho-Fête, qui a duré une douzaine d’années.

Il y eut douze éditions d’Écho-Fête, puis bon.

Ça marchait super bien, mais on avait toute la classe, ben pas toute, mais une bonne partie de la classe politique et économique qui voulait faire le projet de barrage et qui voyait Écho-Fête comme un frein au projet de barrage. Donc il y avait comme une petite guéguerre qui s’est jouée.

Ma position en tant que futur candidat à la mairie au niveau de la minicentrale hydroélectrique… ma position c’est de respecter la démocratie. La majorité de la population de la ville de Trois-Pistoles de même que celle de la MRC des Basques s’est dite en faveur du projet.

Servons-nous de ce projet-là. Écoutez, avec le respect de tous les gens, de dire : « On s’en va de l’avant avec ça, puis on fonctionne. » Mais il faut arrêter de charrier d’un bord et de l’autre avec des hypothèses qui n’ont aucun sens.

Il y avait vraiment un clash, un clivage. Une chicane, dans un petit milieu comme ici, c’est quand même triste en même temps parce qu’on est tellement peu nombreux que quand l’opinion publique est divisée, ben veut veut pas, on perd… On n’a pas la synergie qu’on peut avoir.

Au final, d’avoir tenu notre bout, puis de s’être battu comme on l’a fait, on est récompensé aujourd’hui. Pendant une douzaine d’années, ce festival-là a été tenu à bouts de bras par une gang de jeunes, puis ça a fait en sorte d’attirer d’autres jeunes d’ailleurs, une tranche d'âge qu’on n’avait pas, les 20-30 ans, qui sont en train d’arriver massivement dans le coin.

Puis ça, c’est vraiment rafraîchissant, parce que c’est une des MRC les plus pauvres au Québec, la MRC des Basques, une des plus vieillissantes, sinon la plus vieillissante au Québec.

On avait vraiment besoin de ce sang neuf là, puis ce n’est pas étranger à toute la bataille qui a eu lieu ici. Je pense que tout ça est lié.

SkipSocialShareLinks