Transcription textuelle de la vidéo La Catherine

La rue Sainte-Catherine elle apparaît en 1758 quand un propriétaire en fait un tout petit bout dans le faubourg Saint-Laurent, assez loin de la ville à l’époque.

Ça va prendre à peu près un siècle et demi avant qu’on la développe complètement sur sa longueur totale qui est d’un peu plus de 11 km.

À partir du milieu du 19ᵉ siècle, quand les familles bourgeoises qui habitaient dans la vieille ville déménagent vers de nouveaux quartiers résidentiels — les anglophones vers l’ouest — au pied de la montagne — les francophones vers l’est — du côté des rues Saint-Denis et Saint-Hubert.

Très rapidement dans ces nouveaux quartiers résidentiels, on voit se développer rue Sainte-Catherine, des commerces de proximité, des épiceries, des petits magasins…

Et comme la clientèle, c’est la clientèle la plus riche de Montréal, ça va évidemment attirer les plus gros marchands.

Donc les marchands vont avoir l’idée de déménager du Vieux-Montréal vers les nouveaux quartiers.

Le premier qui fait cela c’est Monsieur Morgan, qui s’installe en 1891 en face du Square Phillips, mais tant qu’à faire, il agrandit son magasin…

Son magasin est trois et demi plus grand que celui qu’il avait dans le Vieux-Montréal.

C’est le premier de ce qu’on appelle les grands magasins.

Et au début, les grands magasins existent essentiellement pour les riches…

Les citoyens ordinaires, les ouvriers, n’ont pas tellement les moyens d’aller là.

Le grand magasin c’est un véritable palais du commerce, de la consommation.

C’est quelque chose d’absolument nouveau.

À partir de ce moment-là, d’autres commerçants vont déménager vers la rue Sainte-Catherine.

Et la rue Sainte-Catherine va devenir la grande rue du commerce de détail, et en particulier, la grande rue de la mode à Montréal.

Très tôt, on va avoir des tramways sur la rue. Dès 1864, c’est les tramways tirés par les chevaux et en 1892 — quand on décide de convertir les tramways aux tramways électriques — dès cette année-là, la rue Sainte-Catherine va avoir des lignes de tramways.

Il va y avoir jusqu’à une dizaine de lignes différentes qui passent rue Sainte-Catherine.

Ça veut dire qu’à partir de ce moment-là, les Montréalais de tous les quartiers peuvent venir magasiner sur la rue Sainte-Catherine.

Les grands magasins commencent à attirer une clientèle qui n’est plus seulement celle de la grande bourgeoisie, mais une clientèle beaucoup plus large qui vient des quartiers.

C’est une ville en expansion.

À la fin du 19ᵉ siècle, il y a un quart de millions d’habitants à Montréal. En 1911, il y en a un demi-million.

Donc, il y a une clientèle nombreuse pour ces grands magasins.

Et donc la mode devient, si l’on veut, l’un des axes fondamentaux de la rue Sainte-Catherine.

À la fin du 19ᵉ siècle, s’ajoute un deuxième type d’activité. On voit apparaître rue Sainte-Catherine des salles de spectacles pour des concerts, pour du théâtre, pour du vaudeville…

Et elles se multiplient le long de la rue Sainte-Catherine de sorte qu’il y a une vocation de culture et de divertissement qui s’ajoutent à la vocation commerciale. Et ça va aller en se développant aussi.

Au début du 20ᵉ siècle, quand le cinéma se développe, les salles vont beaucoup se localiser rue Sainte-Catherine.

Et la première salle entièrement consacrée au cinéma, le Ouimétoscope, est le long de la rue Sainte-Catherine.

Entre 1917 et 1922, on va construire plusieurs grands palaces de cinéma qui comprennent entre 2 000 et 3 000 sièges.

Alors ça devient des lieux de destination, si l’on veut, pour le divertissement qui vont être utilisés jusque dans les années 1960-70.

En plus de cela, au début du 20ᵉ siècle, on voit apparaître des immeubles de bureaux, souvent d’une dizaine d’étages, où s’installent des entreprises qui ont toujours leur siège social dans le Vieux-Montréal, mais qui ont besoin d’avoir des bureaux autour de la rue Sainte-Catherine.

Et puis des cabinets de médecins, de dentistes, d’avocats qui s’installent de ce côté-là.

Quatrième secteur d’activités : l’industrie manufacturière qui s’était implantée un peu dans l’est de la rue Sainte-Catherine — autour de la rue De Lorimier — à la fin du 19ᵉ siècle et qui, au début du 20ᵉ, attire des ateliers de l’industrie du vêtement.

Alors on construit des immeubles comme le Jacobs, le Belgo, le Blumenthal qui sont de grands immeubles logeant plusieurs ateliers de l’industrie du vêtement.

Autour, tout près de la rue Sainte-Catherine, il va aussi y avoir ce qu’on appelle le quartier de la fourrure, autour de la rue Mayor.

Or, à partir des années 1920 et surtout après la Deuxième Guerre mondiale, on voit de plus en plus d’entreprises déménager leur siège social dans le nouveau centre-ville, autour de la rue Sainte-Catherine.

Avec la Sun Life, avec Canada Ciment et d’autres entreprises.

Et ce mouvement-là, il devient définitif au début des années 1960, quand Place Ville Marie ouvre son complexe suivie de plusieurs autres tours de bureaux qui ne sont pas rue Sainte-Catherine, mais juste au sud, le long du tout nouveau boulevard Dorchester qu’on a ouvert en 1955 et qui est devenu le boulevard de prestige qui est aujourd’hui le boulevard René-Lévesque.

Donc, définitivement, à partir des années 1960, il y a un centre-ville à Montréal et la rue Sainte-Catherine en est le volet commercial — le volet de commerce de détail — le volet de divertissement, de restauration…

Alors que les bureaux sont plutôt au sud et au nord de la rue Sainte-Catherine.

Mais c’est vraiment le cœur de ce nouveau centre-ville.

Arrive un nouveau bouleversement à partir des années 1960, c’est l’explosion de la banlieue.

Et avec la banlieue vient une nouvelle invention : le centre commercial de banlieue.

Plus on avance dans le temps, plus les gens qui habitent en banlieue cessent de venir rue Sainte-Catherine pour faire leurs achats et vont plutôt dans les centres commerciaux de banlieue ce qui entraine à partir des années 1960, le déclin, puis ultimement la fermeture de plusieurs des grands magasins comme Simpson, Eaton, Dupuis…

Morgan qui est racheté par La Baie va maintenir cette dimension du grand magasin, mais c’est le seul véritable témoin qui reste. Il y a là tout un pan d’histoire qui s’effondre.

Malgré tout, la rue Sainte-Catherine, sa force d’attraction elle est tellement forte que plusieurs chaînes de boutiques veulent avoir une façade rue Sainte-Catherine.

Et elles viennent s’y installer quand même, même si ça n’a plus le même effet d’attraction d’autrefois.

Il faut dire qu’à ce moment-là, et surtout à partir des années 1960, même si le phénomène avait commencé avant, le tourisme vient donner une nouvelle vie aussi à la rue Sainte-Catherine.

Les grands hôtels sont aux environs. Les touristes qui viennent à Montréal viennent magasiner rue Sainte-Catherine, déambuler aussi rue Sainte-Catherine.

Ce qui fait que la mode reste encore un des grands points d’ancrage de la rue Sainte-Catherine, malgré tous les bouleversements que ce secteur a connus.

Qu’en est-il de l’autre grand volet de la rue, celui de la culture et du divertissement ?

Là aussi, on a l’impression d’une hécatombe parce que les grands palaces de cinéma disparaissent, sont remplacés par des complexes de salles, puis peu à peu s’en vont massivement dans la banlieue, là où le stationnement est le plus facile, et le centre-ville et la rue Sainte-Catherine jouent un rôle mineur dans le secteur du cinéma.

Mais en même temps, il y a d’autres types d’activités culturelles qui connaissent une expansion. Et un moment particulièrement important, c’est l’ouverture de la Place des Arts de Montréal, rue Sainte-Catherine, avec d’abord la grande salle qu’on va appeler la salle Wilfrid-Pelletier, puis ensuite en 1967, on ajoute deux autres salles de spectacles, éventuellement on va ajouter le Musée d’art contemporain, et au début du 21ᵉ siècle, la Maison symphonique.

La Place des Arts devient un véritable complexe culturel qui est un pôle d’attraction, puis autour de cela : des théâtres, des galeries d’art, etc., s’installent dans les environs.

À partir de la fin des années 1980, on voit arriver les grands festivals. D’abord, le Festival de jazz, qui à partir de 1989 s’installe rue Sainte-Catherine, et beaucoup d’autres festivals suivent cette tendance-là.

De sorte que la rue Sainte-Catherine est un pôle culturel majeur.

Et l’on décide, au début du 21ᵉ siècle, de renforcer ça en créant ce que l’on a appelé le Quartier des spectacles, en aménageant de grands espaces publics pour la présentation des spectacles en plein air, des festivals, mais en renforçant aussi les liens entre tous les lieux de culture de ce Quartier des spectacles.

Donc la culture contribue, si l’on veut, à la renaissance de la rue Sainte-Catherine fin du 20ᵉ, début du 21ᵉ siècle.

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