Transcription textuelle de la vidéo À la factrie

Jusqu’au début du XIXe siècle, le territoire géographique de Montréal est relativement limité, restreint.

Montréal est d’ailleurs une ville entourée de fortifications — suite aux guerres coloniales — et à l’extérieur des murs, il existe un certain nombre de faubourgs avec des artisans, avec une activité plutôt agricole.

Mais ce portrait-là va changer assez rapidement à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle avec la période de l’industrialisation.

Il va vraiment y avoir un boom à ce moment-là, un boom géographique.

C’est-à-dire que la ville va prendre de l’expansion assez rapidement. Et aussi, une expansion démographique. La population va avoir une croissance vraiment extrêmement rapide.

Il y a des gens qui vont partir d’un peu partout, des campagnes environnantes pour venir s’installer en ville.

Il y a un événement qui arrive relativement tôt. Dès 1809, il y a un bateau à vapeur qui part de Montréal. Il s’en va jusqu’à Québec.

Il a été fait par John Molson, l’entrepreneur, qui vraiment imagine ce projet.

Et un bateau qui est mû par la force de la vapeur, pour le transport, c’est vraiment un exploit technologique sans précédent pour l’époque.

Le fleuve Saint-Laurent a toujours été la voie de communication importante qui a permis le développement de Montréal.

Le port va connaître une expansion extrêmement importante, extrêmement rapide. Il y a des quais et des installations qui vont se faire tout le long du fleuve à Montréal.

Il va aussi y avoir un réseau ferroviaire qui va se développer. Montréal va être au cœur d’un réseau qui va relier l’ensemble du Canada.

Le projet canadien est un peu aussi ce projet de relier l’ensemble des colonies britanniques en Amérique du Nord ; donc par le réseau ferroviaire, mais aussi aux grandes villes nord-américaines.

Alors donc Montréal est vraiment au cœur de cela.

Alors tout le long du fleuve, il y a des entrepôts qui s’installent, puis des manufactures, qui vont être de plus en plus importantes en termes de taille. Et des gens vont venir y travailler.

Alors, il y a vraiment deux pôles industriels qui vont se développer d’une façon importante à Montréal.

Un du côté est, dans ce que l’on appelait le faubourg ou le quartier Sainte-Marie puis vers Hochelaga-Maisonneuve ; et un du côté ouest, autour du canal Lachine, qui va être reconnu comme la zone la plus industrialisée au Canada, à un moment donné.

Alors c’est vraiment autour de ce fleuve que cela va se faire. Donc, il y a des usines qui viennent s’installer, des usines extrêmement variées.

Cela va être autant du matériel ferroviaire, des wagons, des locomotives, des wagons, des locomotives, du métal, des technologies de l’époque — les premières usines de caoutchouc en Amérique du Nord, c’est à Montréal.

Donc qui demandent de la main-d’œuvre qualifiée, des ouvriers spécialisés. Mais aussi ce que l’on pourrait appeler de l’industrie légère.

Et là, c’est autant du textile, de la chaussure, mais aussi tout ce qui est lié à l’alimentation, des conserveries, des boulangeries. Du tabac bien sûr aussi.

Donc, tout ce dont on a besoin pour la vie en société, c’est produit par des usines.

Pendant plus d’un siècle, Montréal va être la métropole financière, commerciale et industrielle du Canada. C’est vraiment à Montréal que les choses se passent.

Il y a vraiment une grande bourgeoisie d’affaires qui profite de cette prospérité et des occasions qu’offre ce développement économique.

Mais la prospérité, elle n’est pas égale pour tout le monde.

Il y a aussi pour les ouvriers et leur famille, qui sont partis des campagnes environnantes et qui sont venus s’installer en ville ; pour un certain nombre de nouveaux arrivants aussi selon les époques qui arrivent — les Irlandais ou autres.

Pour les familles ouvrières, les conditions sont parfois plus difficiles, plus pénibles.

Et ces gens-là, ils vont s’installer dans des quartiers ouvriers qui se développent très rapidement à la fin du XIXe siècle.

On construit des maisons en séries. Et la maison ouvrière typique, c’est un carré de bois recouvert de briques rouges.

Elle est construite directement sur le sol. Il n’y a pas de fondations profondes. Il n’y a pas de sous-sol.

Donc, ce sont des maisons qui sont humides et pas toujours faciles à chauffer. Il n’y a pas beaucoup d’isolant entre le bois et la brique extérieure. Le toit est plat.

Il n’y a pas beaucoup d’ornementation architecturale, parfois une petite frise à l’étage supérieur. Pas toujours de toilettes. Pas toujours de bain et de douche.

Il y a des bains publics qui vont être construits par la Ville de Montréal justement pour pallier au manque de bains et de douches dans les maisons.

Alors des conditions d’hygiène pas toujours faciles. Des épidémies souvent.

Les familles sont nombreuses dans un très petit logement. On peut s’entasser une famille de six, de huit, de dix. Et le taux de mortalité infantile est extrêmement élevé.

Montréal était reconnue comme une des villes où la mortalité infantile était la plus élevée.

Alors compte tenu des conditions de vie qui sont difficiles, mais des conditions de travail aussi qui sont pénibles, les ouvriers vont petit à petit s’organiser, puis revendiquer un certain nombre de choses.

Il y a des premières associations ouvrières qui vont se créer dès les années 1880.

Une d’elles est très connue — les Chevaliers du travail — c’est vraiment une association qui va connaître une expansion assez importante puis qui va faire plusieurs revendications.

La révolution industrielle, c’est vraiment un changement technologique important. C’est un changement social important. C’est un changement économique important.

Alors le gouvernement fédéral met sur pied la Commission royale d’enquête sur les relations du capital avec le travail.

Et il y a des gens qui vont aller témoigner de : Qu’est-ce que c’est la vie en usine ? Qu’est-ce que c’est la vie des ouvriers ? Qu’est-ce que c’est les conséquences de l’industrialisation ?

Ils vont parler de la déqualification du travail, des longues heures, les journées qui sont interminables.

Il y a des enfants de douze, treize ans qui vont aller témoigner qu’ils travaillent en usine soixante heures par semaine pour des salaires souvent dérisoires. Parfois, ils sont punis par les patrons. On va parler aussi des accidents de travail.

Il y a des machines. Il arrive un accident. Il y a des gens qui sont blessés, qui ne peuvent plus travailler, et encore là, il n’y a pas de compensation pour ces gens-là.

Alors, il y a toutes sortes de témoignages qui sont faits lors de cette commission et de revendications qui sont faites par le monde ouvrier.

Ça va prendre quand même un certain temps et de nombreuses lutes pour que les conditions de travail s’améliorent et la plus grande vague de syndicalisation — on est davantage autour de la Deuxième Guerre mondiale — et là, les conditions vont s’améliorer de plus en plus pour les ouvriers.

Mais après la Deuxième Guerre mondiale, on va assister à un phénomène inverse : la désindustrialisation.

Et là, il y a plusieurs explications à cette baisse de la production industrielle.

D’une part, l’économie se déplace de l’est du continent, vers le centre et vers l’ouest.

Entre autres, avec la Voie maritime du Saint-Laurent, le port de Montréal va perdre une certaine importance et il y a un certain nombre d’usines qui vont déménager plus vers les Grands Lacs et puis éventuellement même vers l’Ouest canadien.

Également, les facteurs de localisation qui ont permis de développer les usines au centre de Montréal vont changer. Le port de Montréal lui-même va se déplacer.

L’ancien port devient le Vieux-Port, devient du patrimoine et le port va se déplacer plus vers l’est. Donc, ça va drainer aussi de l’activité économique plus de ce côté-là.

Et le réseau ferroviaire qui était essentiel au XIXe siècle, il est remplacé par le réseau autoroutier et même par le réseau des aéroports.

Donc, la localisation des usines se fait davantage dans des parcs industriels. Ça quitte le centre.

Alors les vieux bâtiments, ils vont dans certains cas être démolis, mais dans plusieurs cas, ils vont être reconvertis.

L’industrie devient patrimoine et là, les exemples sont extrêmement nombreux de reconversion dans ces vieux quartiers : Des groupes communautaires des organismes culturels, des commerces, de l’habitation.

Donc, il y a toute une réutilisation de ces bâtiments qui fait en sorte que ça donne une nouvelle vie, un nouveau dynamisme à ces anciens quartiers industriels et ouvriers montréalais qui ont été marqués par cette période, mais il reste dans le paysage des traces de cette époque-là.

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