Transcription Se souvenir d'Africville

[Musique entraînante]

« Parcelles d'histoire » Des récits fascinants de notre histoire canadienne.

Épisode 4 : Se souvenir d’Africville

[Narrateur] Africville, à la limite nord d’Halifax. Août 1962.

[Représentant de la ville 1] Il est maintenant temps de déménager dans un secteur plus… agréable.

[Représentant de la ville 2] Vous ne voulez pas vivre ailleurs, dans un endroit où il y a de l’eau potable et des toilettes intérieures?

[Femme du quartier 1] Mais on demande de l’eau potable et des égouts à la ville depuis des années! Pourquoi ne pas nous les donner tout simplement?

[Homme du quartier 1] On n’a pas les moyens d’acheter une maison à Halifax!

[Femme du quartier 2] Nous voulons vivre ici, à Africville! [Représentant de la ville 1] Mais enfin, soyons honnêtes, Africville c’est…

[Homme du quartier 2] Allez-y, dites-le! Africville, c’est un bidonville!

[Les deux représentants] Non, non, ce n’est pas ce que nous voulions dire!

[Homme du quartier 2] On ne vous croit pas!

[Femme du quartier 1] Dites la vérité!

[Homme du quartier 3] Nous payons nos taxes, comme tout le monde, mais nous n’avons pas de poste de pompiers, ni même de réverbères pour éclairer les rues!

[Femme du quartier 2] Africville a déjà été un endroit formidable. On jouait dehors toute la journée. Nos pères allaient pêcher le souper. On cueillait des bleuets. On allait à l’école et à l’église ensemble. Et si on se faisait mal, on pouvait entrer dans n’importe quelle maison pour se faire soigner. Tout le monde s’entraidait.

[Narrateur] On avait promis des terres aux personnes de race noire lorsqu’elles sont arrivées en Nouvelle-Écosse, mais elles n’ont eu que des roches et des broussailles, des terres impropres aux cultures. Elles sont donc venues ici. William Arnold et William Brown ont acheté cette parcelle de terre, ici, en 1848.

[Femme du quartier 2] Nous sommes ici depuis près de 120 ans et vous avez l’audace de nous demander de partir?

[Représentant de la ville 2] Mais, vous ne voulez pas vivre une vie meilleure?

[Femme du quartier 2] Nous aimons notre vie telle qu’elle est, jeune homme. Les Noirs ont ici un endroit où ils peuvent être eux-mêmes. Nous avons des jardins, des poulets et des cochons.

[Représentant de la ville 1] Eh bien, ce n’est plus le cas maintenant. Je suis désolé de vous le dire, mais Africville est une honte pour Halifax. Je ne sais pas comment vous pouvez vivre ainsi.

[Homme du quartier 4] Mais quel autre choix avons-nous? Les Noirs n’étaient installés ici que depuis quelques années lorsqu’on a fait passer le chemin de fer en plein milieu de leurs maisons. Et ensuite, les bonnes gens de Halifax ont décidé de venir vider leurs pots de chambre dans les fosses, juste là. Tout ce que la ville rejetait se retrouvait ici, à Africville. Les abattoirs, où l’on envoyait les animaux, ce pylône électrique, ce dépotoir municipal qui se trouve seulement à quelques pas de ma maison! Sans oublier ces trois enfants qui sont morts parce que les camions d’incendie ont pris trop de temps à venir jusqu’ici. Cela fait seulement sept ans!

[Représentant de la ville 1] D’accord, d’accord, mais lorsque je me promène dans le coin, je vois beaucoup de gens qui traînent, qui ne travaillent pas, des Blancs comme des Noirs. Ce n’est pas tout le monde qui est travaillant ici.

[Femme du quartier 1] Nous n’avons jamais invité ces bons à rien. Ils sont venus à Africville parce qu’ils savaient que vous ne vous donneriez pas la peine de venir les chercher jusqu’ici.

[Homme du quartier 2] Et il n’y a pas de poste de police à Africville non plus!

[Femme du quartier 2] Ne nous obligez pas à partir. Tout ce que nous demandons, c’est ce qu’ont déjà les gens en ville.

[Homme du quartier 4] Je ne leur fais pas confiance.

[Femme du quartier 2] On ne peut pas gagner. S’ils veulent nous chasser, ils le feront.

[Homme du quartier 1] Peut-être qu’il faut simplement essayer d’obtenir la meilleure compensation possible.

[Un marteau claquant]

[Narrateur] Janvier 1964. Sur les 400 personnes habitant à Africville, 41 viennent voter sur un départ éventuel : 37 sont en faveur du déménagement. La plupart des gens ont abandonné la partie, croyant que personne ne les écoute et que rien de ce qu’ils diront ne fera une différence.

[Homme du quartier 3] C’est ça qu’ils nous envoient pour déménager?

[Femme du quartier 3] Que penseront nos nouveaux voisins?

[Homme du quartier 5] Je n’y crois pas! Ils ont démoli ma maison alors que j’étais à l’hôpital!

[Femme du quartier 4] Hé, l’église… ELLE EST DISPARUE!

[Femme du quartier 2] Ils ont tué le cœur d’Africville.

[Narrateur] La destruction de la communauté changera la vie des gens d’Africville à jamais.

25 février 2010. Halifax.

[Peter Kelly, Maire d'Halifax] Au nom de la municipalité régionale d’Halifax, je tiens à présenter mes excuses aux résidents d’Africville et à leurs descendants pour ce qu’ils ont vécus pendant près de 50 ans. Vous avez perdu vos maisons, votre église et les endroits où vous vous rassembliez, en famille et entre amis, pour souligner les grands moments de vos vies. Pour tout cela, nous nous excusons.

[La sonnerie des cloches d'églises]

[Narrateur] L’église d’Africville a été reconstruite en tant que musée en 2012. En juillet de chaque année, des gens viennent d’un peu partout pour se souvenir d’Africville et de sa destruction, mais aussi pour garder son esprit bien vivant.

[Musique entraînante]

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