Faire respecter les langues autochtones

Dans cette leçon, les élèves discutent de la revitalisation de la langue et explorent les diverses façons de véhiculer un message par la langue. 
Par Meredith Rusk Mis en ligne le 11 septembre 2023

Cette leçon peut être proposée après avoir lu le message des aînés Harry Bone et Florence Paynter (page 4) et l’article « Pourquoi nos langues et nos traditions sont plus importantes que jamais » de Richard Van Camp (page 10) dans le guide La vérité avant la réconciliation : Écoutons les survivants. 

Cette leçon permet aux élèves d’apprendre quelques mots ou phrases dans une langue autochtone locale, comme le recommandent les aînés et Richard Van Camp. Les élèves discuteront de la revitalisation de la langue et exploreront les diverses façons de véhiculer un message par la langue. Ils apprendront ensuite à dire quelques mots dans la langue du territoire autochtone où ils habitent ou sur lequel se trouve leur école. 

Dans cette leçon, les élèves : 

  • développeront une meilleure compréhension de la diversité linguistique parmi les peuples autochtones du Canada 
  • apprendront à apprécier les langues autochtones 
  • découvriront l’importance de revitaliser les langues. 

Contexte

Alors qu’ils étaient au pensionnat, les enfants autochtones ne pouvaient pas parler leur langue traditionnelle. Ces langues existaient depuis des milliers d’années et étaient reliées à leurs territoires. Sur ces territoires, qui forment maintenant le Canada, on entendait les langues des Inuits (comprenant cinq dialectes), des Métis (Michif) et une grande variété de langues des Premières Nations. Les personnes d’un territoire peuvent parler la même langue, mais ont des dialectes différents selon l’endroit où elles vivent ou le groupe auquel elles appartiennent. Certains groupes des Premières Nations ont développé un langage des signes afin de pouvoir communiquer avec d’autres nations lors de leurs échanges. 

Apprendre à parler une langue locale (et un dialecte) peut supposer une certaine recherche. Il est important de travailler avec la ou les communautés autochtones locales, dans la mesure du possible. Dans certains cas, il vous faudra demander la permission de parler cette langue ou des directives sur les lieux et circonstances dans lesquels vous pouvez la parler si vous n’êtes pas un membre de cette communauté ou de cette nation. Comme les cultures autochtones sont de nature holistique, tout est relié. La langue est liée au territoire, aux peuples et à la culture. 

L’appropriation culturelle est l’usage de la culture d’un peuple sans son autorisation, il est donc important de bien faire les choses. Si l’apprentissage d’une langue autochtone locale est possible en ligne, alors vous êtes sans doute autorisé à la parler dans un contexte scolaire.

Aussi, n’oubliez pas de protéger la sécurité culturelle des élèves autochtones dans votre classe. Ne demandez pas aux élèves autochtones de parler la langue. Bon nombre d’entre eux ne sont pas en mesure de le faire ou sont mal à l’aise lorsqu’ils s’expriment dans cette langue. Donnez-leur la possibilité de se porter volontaires. Si d’autres élèves connaissent une langue autochtone d’un autre territoire et sont prêts à la parler, vous pouvez les encourager à le faire. Mais n’oubliez pas, le principal objectif est de permettre aux peuples autochtones de revitaliser leurs langues; vous et vos élèves devez donc participer à cet objectif, peu importe les langues autochtones explorées en classe ou à l’école. 

Il est important de savoir que certains mots en français n’ont pas d’équivalent direct dans ces langues. Par exemple, certaines langues des Premières Nations n’ont pas de mot pour dire « désolé », puisque dans ces cultures, une personne doit montrer qu’elle est désolée par des gestes plutôt que par des mots. Dans certaines langues des Premières Nations, il peut y avoir plusieurs mots pour désigner un seul mot en français. Pour dire « bonjour », on pourra employer un mot différent selon la personne que l’on salue ou le nombre de personnes que l’on salue.

Leçon

  • Discutez avec les élèves de l’importance de la langue et des façons dont la langue est un vecteur de sens. Vous pouvez aborder certains des points ci-dessous :
    • Information. Il peut s’agir d’instructions ou d’explications sur la façon dont quelque chose est construit, sur son fonctionnement, ou sur la façon de le réparer; d’instructions sur l’endroit où aller, comme la façon de se rendre à une destination ou un événement; de valeurs éthiques et de protocoles culturels (manières, comportements); d’autres connaissances qui sont considérées vraies (dans la culture occidentale, on parlera de faits).  
    • Sentiments. La langue peut communiquer un état émotif ou une réaction, soit directement, soit indirectement. Par exemple, « Je ne veux pas monter dans les montagnes russes » peut être un indice de peur ou d’anxiété. 
    • ConnaissanceLes façons de savoir et d’apprendre peuvent être transmises par des récits oraux ou écrits.   
    • Culture. L’identité, les croyances et les visions du monde peuvent s’exprimer au moyen de chansons, d’histoires et de noms (comme des noms de lieux). 
    • RelationsLa langue traduit notre lien avec le monde qui nous entoure. Nous pouvons utiliser des mots différents pour décrire le monde selon notre perspective. Par exemple, en français ou en anglais, certains lieux portent le nom d’une personne, comme la ville de Vancouver, mais dans les langues autochtones, le lieu sera évoqué au moyen d’une histoire ou d’un événement. 
  • Demandez aux élèves si eux, ou des membres de leur famille, parlent plus d’une langue. Inscrivez au tableau toutes les langues parlées. Invitez les élèves à réfléchir à leur expérience de la traduction d’une langue à une autre. Posez-leur la question suivante : Pourquoi est-il difficile de traduire directement un message d’une langue à une autre? (les langues n’ont pas forcément les mêmes mots pour exprimer la même idée, ce qui rend la traduction difficile. Il est possible de changer le sens des mots ou des phrases lors de la traduction, d’où l’expression « traduction infidèle ». Donnez quelques exemples, comme cute, zeitgeist et sobremesa). 
  • Expliquez à vos élèves que les enfants des Premières Nations, métis et inuits qui fréquentaient les pensionnats ou les externats ne pouvaient pas parler leur langue traditionnelle. Cela signifiait souvent qu’ils n’apprenaient pas leur propre langue auprès de leurs parents et grands-parents, et ne connaissaient pas les savoirs qu’elle véhiculait. Selon le Recensement de 2016, il y a plus de 70 langues autochtones parlées au Canada aujourd’hui, même si certaines de ces langues ont très peu de locuteurs et risquent de disparaître. De nombreux efforts sont déployés pour revitaliser les langues autochtones, notamment des cours, des politiques et des produits culturels, comme des livres et de la musique.  
  • Expliquez aux élèves que les langues autochtones traditionnelles parlées au Canada étaient très différentes des langues européennes. Par exemple, certaines langues comptaient très peu de noms, accordant moins d’importance aux objets et davantage aux relations, ce qui supposait un recours accru aux verbes. 
  • Posez la question suivante aux élèves : Pouvez-vous vous imaginer parler l’anglais ou le français sans recourir aux noms? Vous pourriez leur demander, par exemple, de décrire leur matière préférée à l’école, leur sport favori ou un bon film. 

  • Aujourd’hui, de nombreuses langues autochtones du Canada ont évolué de manière à suivre la construction de l’anglais ou du français, ainsi qu’à refléter des réalités culturelles, sociales, économiques ou politiques modernes. Par conséquent, ces langues contiennent plus de noms qu’il y a 500 ans.  

  • Posez la question suivante aux élèves : Pourquoi la revitalisation de la langue est-elle importante tant pour les peuples autochtones que non-autochtones? Voici quelques points à soulever lors de vos discussions et que vous pouvez adapter en fonction de l’âge de vos élèves.   
    • La revitalisation de la langue aide les peuples autochtones à guérir du traumatisme d’avoir été privés de leurs langues lors de leur passage dans les pensionnats.  
    • La revitalisation de la langue est une responsabilité collective des peuples autochtones et non autochtones dans le cadre de l’appel à l’action 94 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada.
    • Les langues autochtones sont un véhicule de la culture, et elles permettent aux peuples autochtones d’acquérir un savoir culturel et de tisser des liens plus profonds avec leur vision du monde.  
    • La langue relie les peuples autochtones à leurs ancêtres et à leurs histoires; tous les Canadiens peuvent en tirer une meilleure compréhension du passé et de nos relations entre peuples.
    • Les connaissances traditionnelles autochtones sont transmises par le langage, surtout en ce qui concerne le territoire et l’environnement, et peuvent servir à résoudre des problèmes actuels. 
    • Ces langues participent à l’autonomie et à l’autodétermination des peuples autochtones. 
  • Demandez aux élèves d’effectuer une recherche sur leur territoire local et sur les langues autochtones qui sont parlées à l’endroit où ils habitent ou vont à l’école. Vous pouvez utiliser les ressources suivantes : 
  • Demandez aux élèves de trouver d’autres ressources pour apprendre une langue autochtone locale, ainsi que de l’information sur des activités de revitalisation et de préservation. Ils peuvent consulter des sites Web, des articles de journal, YouTube,  leur bibliothèque locale, les universités, les représentants des gouvernements autochtones, les centres d’amitié ou d’autres ressources communautaires. Regroupez toutes ces ressources et initiatives dans un cahier numérique ou sur papier. 
  • Si possible, invitez un aîné ou un membre de la communauté en classe pour parler de préservation et de revitalisation des langues. Demandez aux élèves d’apprendre quelques mots ou phrases dans la langue de votre invité afin de pouvoir lui dire « bonjour » ou « bienvenue ». En plus d’une offrande traditionnelle conforme à la culture locale, les élèves peuvent créer une carte de remerciement en y inscrivant le mot « merci » dans la langue autochtone locale. 

Activités d’enrichissement

  • Demandez aux élèves de choisir de sept à treize mots qui sont utilisés régulièrement (p. ex. au revoir, désolé, oui, non, assis, debout, marcher, maman, papa, grand-mère, grand-père, enfant, soleil, lune, étoiles, les chiffres jusqu’à 5 ou 10, certains animaux communs). Créez des affiches pour la classe et l’école illustrant ces mots, dans une langue autochtone, et leur signification.
  • Les élèves peuvent chercher à en apprendre davantage sur les langues autochtones au Canada : Combien de langues autochtones y a-t-il au Canada? Quelles sont les familles de langues et où se trouvent-elles? Quelles sont les langues et les liens avec les nations des É.-U. (par exemple, le peuple Déné habite dans le nord du Canada, mais également dans le sud de l’Alberta et des États-Unis). 
  • Observez la Journée nationale des langues autochtones, le 31 mars, en organisant une célébration spéciale, une présentation ou le visionnement d’un film. 
  • Les Nations Unies ont déclaré que la décennie 2022‑2032 serait la Décennie internationale des langues autochtones. Demandez aux élèves de se pencher sur ce que cela signifie et sur la façon dont le Canada s’engage à contribuer aux objectifs de cet événement. Les élèves créeront une présentation destinée à d’autres classes sur l’histoire et l’importance de la revitalisation de la langue et les façons dont les élèves, à titre individuel, peuvent soutenir la Décennie internationale des langues autochtones.

Conclusion

Cette leçon peut être enrichie en incitant les élèves à explorer d’autres mots ou phrases. Les élèves et le personnel seront encouragés à utiliser ces mots sur une base régulière afin que leur usage devienne naturel, surtout s’il y a des élèves ou des membres du personnel qui appartiennent à ce territoire local. On aidera ainsi ces personnes à revitaliser leur langue, ce qui permettra à tous de jouer un rôle actif dans les efforts de réconciliation.  
Ligne d’écoute des survivants des pensionnats autochtones : 1-866-925-4419

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